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Une commune transformée avec sensibilité

Situé sur les rives du lac Léman entre Nyon et Genève, le village de Prangins (4000 habitants) a su préserver son identité malgré un boom immobilier croissant. Lauréat du prix Wakker 2021, il a de ce fait également gagné une reconnaissance officielle pour ses années d'efforts en faveur de la biodiversité et de l'authenticité.

 

 

 

Marianne Kürsteiner (texte), Zuzana Havlin / Anna Coenen (photos)

La région située entre Genève et Lausanne est l'une des zones immobilières les plus chères du monde, en raison de sa situation exceptionnelle au bord du lac Léman, et de la proximité avec la Genève urbaine, qui abrite de nombreuses organisations internationales. Des diplomates et des personnalités du monde entier cherchent à s'y installer, et pour la population locale, il est presque impossible de trouver un logement abordable.

 

Un riche héritage architectural

Le danger de verser dans un cauchemar de béton uniforme menace un riche héritage paysager et architectural. Il est donc d'autant plus important que la politique et l'architecture sensible, telle qu'elle est enseignée à l'EPFL toute proche, travaillent ensemble. Cette collaboration est devenue réalité il y a 15 ans, en grande partie grâce aux autorités de Prangins qui ont fait appel à Bruno Marchand, urbaniste, architecte et ancien professeur de l’EPF pour soumettre leur village à une rénovation globale et sensible. La première étape a consisté à identifier les lieux qui sont ou devraient devenir caractéristiques. La vision est née, à partir du bourg historique, de créer un lieu de centralité et de sociabilité et de recréer un lien avec le château. «Il devenait clair qu’il ne fallait pas concurrencer ce point névralgique par la création de nouveaux centres en périphérie» a souligné Bruno Marchand.

Avec la question de la centralité, celles du patrimoine, du paysage et de l’accueil de nouveaux habitants étaient au coeur des préoccupations. La municipalité a alors élaboré une stratégie de développement sur le long terme.

 

 

Château des Guiguer et son environnement

Construit et transformé tout au long du 18e siècle par ses propriétaires, la dynastie des Guiguer, le chateau raconte un âge de développement économique et culturel exceptionnel pour le Pays de Vaud à cette époque. Désormais restaurés après nombre de vicissitudes, le château et son vaste potager historique, patrimoine des Pranginois, sont devenus en 1998 ceux du pays tout entier, lorsque le site romand des Musées nationaux suisses y a été installé.

Aujourd'hui, le Musée national suisse du château de Prangins raconte l'histoire de la Suisse moderne, démocratique et industrielle entre 1730 et 1920.

Les expositions permanentes sont un voyage au temps des Lumières et les expositions thématiques illustrent, par leurs nombreuses activités, la culture et l'actualité suisses d'aujourd'hui.

À côté du château se trouve un potager historique où sont cultivées des plantes anciennes, que l'on peut déguster au café du château.

Le potager est toujours entretenu par la famille Denogent, dont l'ancêtre était responsable du jardin au 18e siècle. Leur entreprise, qui a également redessiné le parc du château, est responsable de ses cultures.

 

 

Densifier, renforcer et dynamiser le centre

La première stratégie de développement privilégie le respect du patrimoine bâti et paysager. Suite à la nouvelle looi sur l’aménagement du territoire (LAT), la commune poursuit une urbanisation modérée vers l’intérieur. 

Ensuite, des investissements dans les espaces publics, ont favorisé l’animation du coeur du village afin d’en faire le centre de la communauté. Ainsi, l’ancienne ferme du château a été transformée en maison de commune, abritant l’administration, le poste de police, une épicerie, un café et un jardin d’enfants. De même, le vieux four accueille désormais une boulangerie.

Non loin de là, se trouvait l'ancienne salle communautaire, où l'on jouait autrefois des pièces de théâtre. La démolition de la salle a ouvert une vue sur les plus anciennes maisons de Prangins.

 

Une mixité sociale

Afin de faire vivre le bourg historique et de casser l’image d’une commune pour les riches tout en renforçant la mixité, la municipalité a prévu la création d’habitats collectifs. C’est la Coopérative d’habitation les Plantaz que y a créé des logements subventionnés en droit de superficie. Enfin, 16 appartements gérés par Plantaz ont été aménagés dans un groupe de bâtiments classés.

Après une rénovation complète, l’Auberge communale a aussi retrouvé ses fonctions de restaurant et d’hôtel. Et avec l’achèvement de la nouvelle place de la Broderie, la commune peut désormais passer au réaménagement de la place du village.

Afin de préserver le site, les paysages culturels et les parcs, Prangins a renoncé à rendre constructibles des surfaces cultivées. Les zones vertes historiques entre le château et le lac sont restés libres, des espaces de détente comme le vallon des Fossés ont été créés et des terres conservées pour l’agriculture.

 

 

Une architecture contemporaine

Parallèlement aux concours pour la réhabilitation du centre, deux autres concours ont été organisés et ont abouti à la construction de l’école enfantine des Morettes et la résidence les Papillons avec ses logements protégés. D’autre part, des investissements dans une architecture contemporaine ne manque pas comme en témoigne cette nouvelle école des Morettes qui a été réalisée par l’architecte Pierre-Alain Dupraz.

Et les travaux se poursuivent. Avec la revalorisation de la place du village transformée en un espace de convivialité situé entre l’ancienne ferme du château et l’ancien fournil occupé aujourd’hui par une boulangerie. A cet effet, le projet prévoit de libérer l’espace pour la circulation piétonne et cycliste et de planter un arbre majeur entouré d’un banc.

Afin de limiter l'impact du trafic dû à une mobilité accrue, deux mesures d'infrastructure accompagnent les transformations au cœur du quartier résidentiel de Prangins-Nyon. D'une part, la rénovation de la route principale qui longe le lac, et d'autre part, une passerelle reliant le lac à la gare de Nyon. Cela facilitera également la vie des piétons et des cyclistes et améliorera l'interface avec les transports publics.